11 septembre 2012

La langue française a bon dos


« Comment trouves-tu Montréal plongé dans cette agitation sociale ? » lui ai-je demandé. Spontanément, elle m'a simplement répondu « tant que je n'ai pas de pistolet pointé sur ma tempe, tout va bien ». Originaire du Liban, mon amie Y. revenait à Montréal ce printemps après plusieurs mois passés au Moyen-Orient. Il y également ma jeune collègue I., que je côtoie tous les jours et qui est originaire de l'ex-Yougoslavie. Toute petite, elle a connu les ravages de guerres de pouvoir qui ont détruit à jamais son pays autrefois uni et prospère qu'elle a dû fuir avec sa famille.

Il y a aussi ces images quotidiennes de ces réfugiés, souvent des femmes et des enfants, qui fuient à pied leur ville assiégée en Syrie pour se réfugier épuisés et sans ressources en Jordanie; celles de ces corps inanimés d'immigrants clandestins - dont beaucoup d'enfants - sortis des eaux alors que leur bateau de fortune qui les amenait vers un avenir supposément meilleur a sombré dans les eaux turques. Sans oublier celles de ces attentats sanglants et quasi-quotidiens en Irak.

Tout ça pour dire que l'on a la chance de vivre dans un petit coin de paradis sur terre, vous ne trouvez pas? Et il faut avoir vécu ou voyagé dans certains coins du monde pour se demander quelle est la raison qui nous pousse tant à saborder sans l'aide de quiconque ce petit coin de paradis. Peut-être un peu trop humaniste ou idéaliste, je ne me l'explique pas.
Certes, le français perd peut-être du terrain, particulièrement à Montréal, je le concède. Mais est-ce une raison suffisante pour dresser autant de barrières entre les communautés des deux peuples fondateurs du Québec? Est-ce une raison suffisante pour exacerber des tensions nourries presque uniquement par quelques ténors radicaux des deux bords embourbés dans une rancoeur sans fin?
Je suis extrêmement fatiguée d'entendre ces discours politiques bâtis sur ce même paradigme de la peur de l'un et de la légitimité suprême de l'autre. Je suis tannée de cette excuse nauséabonde de la primauté de la langue française pour bâtir une unité nationale forte où le «nous» s'imposera à «eux».

Il est déplorable que le Québec fonctionne encore en vase clos, où les grands bouleversements planétaires sont absents de nos petits débats teintés de victimisation et de mots revanchards. Je suis convaincue que ce gouffre de plus en plus grand entre la situation sur le terrain et les propositions de nos politiciens nuit fortement à notre foi en l'avenir en tant que puissance en devenir. En tout cas, à la mienne.

Le français perd donc des plumes. Entre vous et moi, ce n'est quand même pas Montréal qui, à lui seul, est en train de saborder le statut francophone du Québec tout entier. Mesdames et messieurs les élus de notre nouveau gouvernement et de l'Assemblée nationale, élaborez des lois, assurez-vous de leur respect et imposez des amendes salées si nécessaire. Bref, portez vos culottes et cessez d'alarmer. La loi 101 existe, adaptez-la ou renforcez-la si vous le jugez nécessaire. Pour ma part, je ne vous en voudrai pas.

Parce que j'ai hâte que l'on change de registre et que l'on grandisse sur cette richesse linguistique plurielle avec en son centre la langue française bien entendu.

Je vous laisse sur cette citation que j'avais déjà publiée sur ce blogue : «Les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts.»(Isaac Newton)

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