Messieurs Charest, Khadir et Legault,
Je vous écris
cette lettre que vous lirez peut-être si vous en avez le temps.
En premier
lieu, soyez assurés que je tenterai de suivre vos campagnes respectives avec
toute l’attention qu’elles méritent. Déjà, on dit que vous avez pris votre
rythme de croisière, notamment dans ces autobus rutilants qui sillonneront les
rues de nos villes et les routes de nos campagnes. Déjà, vos slogans ont été
annoncés, et des photographies des membres de vos équipes et de vous-même vous
offrent en pâture sur ces affreuses pancartes qui « polluent » notre horizon
visuel.
Parlant
d’horizon, permettez-moi de vous avouer que j’ose espérer que vos discours et
messages surpasseront le poids léger de mots ou d’expressions tels que, par
exemple, « Debout », « Pour le Québec », « C’est assez, (il) faut que ça change
», mots que vous nous proposez pourtant très sérieusement comme leviers de
motivation.
J’ose espérer aussi
que vous ferez vite place à de la substance en lieu et place de ce vil combat
d’image et de cette course ridicule aux candidats vedettes.
J’ose espérer enfin
que vous laisserez tomber au plus vite cette rhétorique populiste qui vous
pousse si souvent à dire ce que « le peuple » veut entendre. La vérité n’est pas
toujours bonne à dire, certes, mais même si elles doivent bousculer, échauffer
les oreilles, ou faire grincer des dents, parlez-moi de ces mesures et
solutions qui sauront redonner du sens à la responsabilité individuelle et
collective. Cessez de nourrir la sinistrose ambiante à coups de bilans négatifs
et de phrases clés sorties tout droit du cerveau de vos relationnistes (cf. «
Jacques Duchesneau est le Eliott Ness du Québec » dixit François Legault).
En passant,
cessez aussi de me servir à toutes les sauces le mot « peuple », comme le
faisaient ces rois qui s’adressaient à leurs sujets. J’ai toujours l’impression
d’entendre « petit peuple », je ne peux vous expliquer pourquoi. Peut-être
est-ce l’impression que j’ai parfois – et même de plus en plus souvent - de
faire partie d’une nation désincarnée, déconnectée du monde qui l’entoure, et surtout
repliée sur elle-même où il règne trop souvent de sempiternelles chicanes de
famille. Des chicanes de famille que vous, madame et messieurs les chefs de
partis, ne manquez pas de nourrir par des bassesses de tous genres et des
guerres intestines sur la seule base de l’ennemi à abattre.
Alors, je vous
en supplie, donnez-moi de l’oxygène qui ne se monnaie pas uniquement à coups de
promesses de dollars ou d’emplois. Donnez-moi plutôt le goût de rêver à un Québec
à la fois moderne, solidaire et prospère qui saura se développer et
s’imposer dans une situation géopolitique mondiale en pleine mouvance. Croyez-moi,
je serais prête à faire encore plus ma part. Pour moi-même, pour ma fille, pour
mes concitoyens, et pour les prochaines générations.
À défaut de
quoi, j’ose avancer le fait que vous risquerez de perdre votre petite guerre
pour cause de déserteurs aux prochaines élections (pour faire un nouveau clin
d’œil à la chanson de Boris Vian). Certes, je n’ai pas encore pris de décision,
mais je pourrais en faire malheureusement partie si la tendance se maintient.
Démocratiquement
vôtre.
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