04 juin 2011

Les grandes griffes d'un petit musée

Après avoir rendu hommage au travail de Yves Saint Laurent et de Denis Gagnon, le Musée des beaux-arts de Montréal présente, dès le 17 juin prochain, l'exposition La planète mode de Jean-Paul Gaultier de la rue aux étoiles, qui sera l'occasion de souligner les 35 ans de carrière du génial créateur. Qu'un grand musée ouvre ses portes depuis quelque temps au monde de la mode confirme à quel point celle-ci est liée à l'art. Que le public se déplace à chaque fois en grand nombre démontre qu'elle en est véritablement un.

Je ne manquerai certainement pas d'aller admirer les créations de monsieur Gaultier. En attendant, j'aimerais vous parler du Musée du costume et du textile du Québec (MCTQ). Le connaissez-vous ? En avez-vous entendu parler ? Non ? C'est normal. Malheureusement normal. Car ce musée qui regorge de trésors du patrimoine de mode québécois (plus de 6 000 objets des XIX, XX et XXI siècles) n'a pas la place qu'il mérite.

Alors que son extraordinaire directrice, Suzanne Chabot, à la fois passionnée et... courageuse, tente d'exposer des pièces magnifiques dans des salles minuscules d'une maison ancestrale de Saint-Lambert, le reste est soigneusement remisé dans un entrepôt de la rue Saint-Antoine à Montréal. Croyez-moi, j'ai eu l'occasion de visiter cet endroit, et lorsqu'on entrouvre les nombreuses housses qui s'y trouvent,  on ne peut que déplorer le fait de ne pas avoir accès à ce patrimoine trop méconnu.

On pourrait ainsi se rappeler que Montréal avait une maison de haute couture dans les années 40, sous la férule de Marie-Paule Nolin alors appelée « la grande dame de la haute couture montréalaise ».  Ou encore qu'une certaine Clairette Trudel avait fait défiler des mannequins de la Maison Dior pour présenter sa nouvelle collection en 1964. Sans oublier les Jacques de Montjoye, Michel Robichaud ou encore Marielle Fleury qui ont, autre autres, été des ambassadeurs de la mode québécoise à Expo 67.

Autant de noms qui ont donné vie à des griffes qui incarnent la mode d'ici, aujourd'hui personnifiée par des surdoués de la coupe et du design, comme Marie Saint Pierre, Hélène Barbeau, Michel Desjardins, Christian Chenail, Dinh Bà, Philippe Dubuc et tant d'autres.

Or, il faut savoir que Suzanne Chabot ne se contente pas d'imaginer des expositions originales dans son espace exigu. Elle se démène et frappe à toutes les portes d'organismes municipaux ou gouvernementaux pour véritablement sauver son musée et ses trésors, promis pour le moment à un avenir bien sombre. Oh, elle ne demande pas des millions - quoique ! - mais avant tout une place à Montréal où le grand public pourrait admirer de près des créations d'hier et d'autres plus contemporaines, et comprendre toute l'étendue d'un art qui n'est pas uniquement l'apanage des autres, et dont on peut se permettre d'être fiers.

Si l'on peut se vanter d'avoir au Québec des musées comme celui de l'abeille, du chocolat ou encore du Rock n' roll, on doit bien pouvoir trouver de la place pour un musée consacré à la mode québécoise et à ses artisans...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire