Toute aussi triste qu’inattendue, la mort de l’acteur et humoriste Robin
Williams a frappé l’imaginaire, et les messages empathiques se répandent depuis
sur les réseaux sociaux. Certains, trop enclins à démontrer leur grand cœur et
partager leurs bons sentiments (oui, vous pouvez lire ici une pointe d’ironie)
se sont toutefois mélangés les pinceaux en le confondant avec le chanteur
britannique Robbie Williams.
Au-delà de la mort de l’artiste, beaucoup de choses ont été dites, redites
et trop relayées par nos médias – y compris la sérieuse Radio-Canada – autour des
circonstances tragiques entourant son départ.
Se pourrait-il donc que certains journalistes ou rédacteurs en chef n’aient
pas suffisamment de sujets à traiter pour décider de gonfler au maximum une
nouvelle ? Il semble bien que oui. Car le cas de Monsieur Williams, acteur et
humoriste, leur a ouvert toute grande la porte pour se pencher sur LA question
: nos humoristes sont-ils en danger ?
Comme le titrait si bien cet
article de Lapresse.ca, la détresse qui se terrerait derrière l’humour est
devenue en un rien de temps le sujet de l’heure. Et pour lancer le débat, quoi
de plus pertinent que de faire appel, notamment, au grand manitou du rire au
Québec, Gilbert Rozon, quitte à le déranger, si j’ai bien compris, pendant ses
vacances en Écosse. Toute une réflexion de fond, vous ne trouvez pas ?
Certes, rire haut, fort ou gras, c’est bon pour le moral et la santé. Toutefois,
ce n’est pas parce qu’on rit que c’est toujours drôle. Pour ma part, j’ai vraiment
commencé à rire jaune au fil des chroniques de certains médias. TVA Nouvelles a
même poussé la bêtise jusqu’à diffuser en primeur que même le
gorille Koko pleure Robin Williams – image à l’appui ! Oui,
monsieur ! Comme le souligne une personne dans un commentaire, je
cite : «Si on en est rendus à se demander ce qu'un gorille pense de la
situation, les médias doivent avoir fait le tour »…
Qu’est-ce qui s’est passé pour que l’on soit descendus aussi au ras les
pâquerettes en termes de contenu médiatique et de conversation, cette fois-ci
autour de la disparition d’une vedette dont on se foutait bien de la santé
mentale jusqu’au jour fatidique ? Mais oui, bien sûr, parce que c’est un
humoriste ! En effet, en plus de la bouffe et des chroniques/émissions de
cuisine ou d’alimentation et de la météo, l’humour n’est-il pas l’autre moteur
de la société québécoise ? Pas étonnant alors que l’on s’inquiète d’une
éventuelle détresse chez nos humoristes. Tout se tient.
Pourtant, on aurait pu choisir de traiter la nouvelle de la disparition de
monsieur Williams pour rappeler ce qu’est la dépression et, pourquoi pas,
amorcer le début d’une réflexion sur notre perception collective du bonheur.
Car la stupéfaction qu’un grand nombre d’entre nous a ressentie et certains
commentaires publiés démontrent à quel point les notions de dépression ou de
mal être ne sont pas encore bien comprises. « Voyons donc, un homme qui avait
du succès, de la reconnaissance, de l’argent, une famille, ça ne peut pas sombrer
comme ça ! » teinte ainsi le fond de la pensée de plusieurs d’entre nous. Réaction
tout à fait normale dans une société devenue hyper matérialiste où chaque individu
est associé à ce qu’il possède (objets, profession, loisirs, argent, nombre
d’amis, relations amoureuses, etc.) et qui le distingue donc forcément des
autres. Le réseau social Facebook matérialise parfaitement la dynamique humaine
basée sur une perception instantanée de l’autre par le biais de son image
sociale. Si on pouvait un jour réaliser qu’être riche, ce n’est pas avoir
beaucoup, c’est avoir besoin de peu… Je n’ai pas dit « rien ». Si l’argent ne
fait pas le bonheur, il y contribue quand même, on est certainement bien
d’accord là-dessus.
Ne pensez-vous pas qu’il serait temps de ré-apprivoiser l’art de la
conversation. Un simple « ça va ? » lancé sans y penser ne suffit pas à
entrer en contact. Combien de fois nous arrive-t-il de ne pas prendre la peine
d’attendre ou d’écouter la réponse de l’autre pour mieux poursuivre notre
chemin ?
L’humoriste (encore !) Anne Roumanoff, dans un de ses sketchs, lance
la phrase suivante (en référence à l’utilisation continue d’un téléphone
intelligent) : « à force d’utiliser ton appareil, tu te rapproches des
gens qui te sont loin et tu t’éloignes de ceux qui te sont proches. ». Il est
bien facile et pratique, certes, de faire le procès de ces technologies
modernes, il n’en demeure pas moins que la civilité et la considération
désertent de plus en plus nos relations humaines (cf. si vous cherchez un emploi,
vous avez certainement de beaux exemples à partager).
Comme il est impossible de tout changer à la fois, je suggère que nous
réfléchissions à notre relation à l’apparence. Car tout n’est que jeux de
masques dans toutes les sphères de la vie : ne pas paraître faible, ne pas être
en difficulté financière, ne pas vivre seul, ne pas prendre de vacances (ça
paraît bien auprès du boss), ne pas embêter les autres avec nos soucis au
risque de devenir toxique et de se faire jeter comme un déchet, surtout ne pas
pleurer, rester fort, être le plus souvent possible de bonne humeur, faire du
sport (de haut niveau, c’est mieux), sembler jeune (le plus longtemps
possible), avoir les meilleurs plus beaux enfants du monde, intelligents et
bien élevés avec des prénoms originaux si possible, posséder le dernier gadget
disponible sur le marché, avoir un magnifique chien, etc.
Comment peut-on alors avoir un contact authentique avec les autres ou plus
encore, comment déceler chez eux la moindre once de tristesse ou de mélancolie ?
C’est ça un vrai débat de société, et ça englobe bien entendu nos humoristes bien-aimés. Ça vous tente d’y participer, dans la joie et la bonne humeur bien sûr ?
C’est ça un vrai débat de société, et ça englobe bien entendu nos humoristes bien-aimés. Ça vous tente d’y participer, dans la joie et la bonne humeur bien sûr ?
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