14 janvier 2014

Ça l'a vraiment pas d'bon sens !*

Régulièrement, le sujet revient au devant de la scène puis on passe toujours à autre chose. Je parle ici du danger qui pèse sur la primauté ou la pérennité (ou les deux) de la langue française. Il est vrai qu’elle perd de sa verve dans toutes les sphères de notre société. Notamment dans le monde du travail où, ne nous voilons pas la face, on trouve rarement un bon emploi si on ne maîtrise pas l’anglais presqu’autant que le français.

Bien sûr, en tant que terre d’accueil de nombreux nouveaux arrivants, il y a certainement une portion de cette population immigrante qui est ignorante de notre langue. Mais y a-t-il suffisamment de services de francisation à leurs services ? Pas si sûre. En contrepartie, il ne faut pas oublier qu’il y a aussi une autre portion importante d’immigrants, éduqués, compétents, et sélectionnés par les services d’immigration québécois, qui parle très bien le français. Entre autres, des ressortissants du Maghreb qui comptent, selon les chiffres, pour 21 % des immigrants. Mais dans notre débat actuel qui ressemble à une chasse au foulard musulman, l’apport de ces hommes et de ces femmes dans la sauvegarde collective du français passe soudain au second plan…  Il y a aussi tous ces « maudits » anglos dont un grand nombre d'entre eux ne ferait aucun effort pour pratiquer notre langue. Sont-ils vraiment si nombreux à être unilingues ?

Mais le danger qui pèse sur notre langue ne vient pas seulement des autres ou des circonstances. Le bien parler et le bien écrit ne sont pas toujours considérés comme ben ben sexy, bien au contraire. Aussi, on vit dans une société qui carbure de plus en plus à l’image et de moins en mois au nombre de mots, surtout pas savants. Et puis, n’oublions pas qu’il y a toujours 49 % d’analphabètes fonctionnels au Québec; preuve qu’on a échoué, en tant que société, à offrir les mêmes chances à tout le monde, même la transmission du b.a.-ba. Comment, alors, batailler en force et en nombre contre l’ennemi…

Certes, il est vrai que l’apprentissage du français peut être ardu tant ses règles élémentaires de grammaire sont complexes, quand ce sont pas leurs énoncés. Vous souvenez-vous, vous, des règles que vous avez apprises sur vos bancs d’école ? Pour ma part, j’avoue ne plus trop me souvenir de la façon dont elles étaient enseignées « à mon époque ».  Mais étaient-elles aussi compliquées à comprendre qu’aujourd’hui ? Là est mon doute.

Voici quelques exemples de ce qu'on peut lire dans des manuels de français du secondaire aujourd'hui :

  • Sur le plan textuel, un adverbe peut jouer le rôle de coordonnant, de marqueur de modalité ou d’organisateur textuel.
  • Que la subordonnée complément de phrase se distingue de la subordonnée relative, de la subordonnée complétive et de la subordonnée relative déterminative. Et qu’une structure abrégée peut remplacer une subordonnée corrélative, ce qui permet de la réduire et de varier les structures syntaxiques. (sic)
  • Outre la phrase de base, il existe aussi des phrases à construction particulière comme les phrases impersonnelles, à présentatif, non verbale, ou infinitive. D’ailleurs, il existe quatre types de phrases et huit formes de phrases…
L’autre jour, ma fille m’a demandé de l’aider pour un de ses exercices. Elle avait des difficultés à comprendre ce qu’elle lisait.

« Si le subordonnant le permet, une structure abrégée peut remplacer la subordonnée complément de phrase, ce qui permet de la réduire et de varier les structures syntaxiques. »

Elle : ça veut dire quoi, maman ?

Moi : un instant, laisse-moi voir ça…  Voyons, voyons, je ne me souviens plus très bien, c’est quoi déjà, un subordonnant ?

Elle : j’sais pas.

Moi : hum, on va faire une petite recherche sur Internet ?

Sur le site de l’Office de la langue française, on peut lire ceci: on définit un subordonnant comme un mot qui sert à subordonner une phrase à une autre en l’y intégrant pour en faire une subordonnée.  Les subordonnants expriment souvent (…) une idée de but, de conséquence, d’antériorité, etc. C’est pourquoi on les appelle aussi des marqueurs de relation.

Est-ce que j’ai vraiment besoin de vous dire que ça ne nous a pas aidées ?

Sur papier, on dit qu’un enfant qui apprend avec plaisir a plus de chances de réussir que celui qui ressent les apprentissages comme une corvée. Sur le terrain, si on demande aux élèves de retenir des règles grammaticales aussi alambiquées, pensez-vous vraiment qu’ils se marrent ? Vous me direz que sans sa grammaire, aucune langue ne pourrait survivre. C’est un fait et la langue française ne fait pas exception, bien au contraire. Toutefois, je me pose la question suivante : « à force de changements dans les programmes pédagogiques, est-ce que nous compliquons l’apprentissage des jeunes ? Avec tout cette matière (imposée par le ministère) à ingurgiter en peu de temps, y a-t-il vraiment de la place pour des dictées, des lectures à haute voix, des ateliers d’écriture, des exposés, des résumés de livres ? Pour plonger dans un livre ou pour écrire des histoires ? Qui sait, peut-être y a-t-il plusieurs grands écrivains qui sommeillent chez nos jeunes !

Je me souviens très bien du cri d'alarme que Lucien Francoeur avait lancé sur Canoe.ca en 2011. Lui-même enseignant en littérature, il parlait alors d'un véritable désastre ou même d'une bombe qui allait exploser. En voici un extrait :

« Un ministère de l'Éducation complètement déconnecté de la réalité ; des étudiants gavés de gadgets qui sont incapables de comprendre des consignes de base ; des illettrés qui n'ont pas de culture ; des exigences qui ont baissé à tous les niveaux... ». Et plus loin : «Un élève qui entre au collégial de nos jours, il faut lui enseigner ce qu'est un livre ou même ce que signifie recto verso (…). Malheureusement, j’ai tendance à croire qu’il voyait juste. Pour lire l'article au complet, cliquez ici.

* Dans cette phrase affirmative emphatique, il semble bien y avoir une erreur dans la matérialisation de la négation, je crois...

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